L'engagement religieux aujourd'hui...

Publié le par Initiative Rabbinique

 

  PARACHA EKEV
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MOISE poursuit la récapitulation des préceptes religieux qui seront énoncés tout au long de ce cinquième livre de la Torah, DEVARIM. Il en vient nécessairement à parler de la récompense qui attend ceux qui accomplissent une prescription religieuse mais aussi des châtiments qui frapperont ceux qui seront en infraction. Toute société établit ses règles. La Torah n’échappe pas à ce principe. La sidra débute donc par le terme EKEV. Il signifie parce que ou désigne le talon (origine du nom de JACOB (Genèse 25, 26).

Le Midrash prend en compte la seconde définition en disant que la récompense ne doit pas se trouver sous nos yeux, comme si on la recherchait. Elle est essentiellement fonction des démarches que nous accomplissons pour réaliser une bonne action, autrement dit, des efforts en tous genres que nous consentons pour agir dans le sens du bien. En un mot, la récompense qui doit intervenir, doit être la conséquence à laquelle on ne pense pas. Elle ne doit pas être le but exclusif de nos préoccupations. Elle se mérite par les efforts que nous consentons, en utilisant pour cela notre corps qui agit pour réaliser ce que demande notre âme.

Selon nos commentateurs, en utilisant le terme EKEV pour désigner le TALON, le texte veut ainsi nous enseigner que nous ne devons pas fouler les mitzwoth aux pieds. Chaque chose est importante en soi. Il n’y a aucune échelle de valeurs dans les prescriptions religieuses. Il n’est pas possible de dire laquelle d’entre elles a plus d’importance qu’une autre. Tel est d’ailleurs ce que vient nous dire le texte des PIRKE ABOTH, au nom de Rabbi JUDA HANASSI (qui a mis en forme l’ensemble de la MICHNA). Il nous dit en effet : « Sois attentif à l’accomplissement d’une mitzwa d’apparence facile comme celle qui te semble difficile, car tu ne connais pas la récompense qui s’attache à chacune d’entre elles. » (Chapitre II, michna 1).

En somme, il faut savoir que la Torah est un ensemble de principes dont on ne saurait dissocier aucune de ses composantes, de la même manière que l’on ne peut théoriquement savoir si telle partie du corps humain est plus vitale qu’une autre pour la conservation et le bon état de l’ensemble.

Il convient surtout de remarquer que notre paracha contient un verset pouvant nous servir de devise. Il est dit en effet : « Car ce n’est pas de pain uniquement que se compose la nourriture de l’homme, mais l’homme vit de tout ce que produit le verbe du Seigneur. » (Deutéronome VIII, 3).

En clair, cela signifie, d’une part, que D.ieu pourvoit toujours à nos besoins matériels, mais que d’autre part, pour partie spirituelle de notre existence, ce qui compte, c’est de savoir s’inspirer de la parole divine pour suivre la bonne voie consistant à craindre D.ieu, à Le servir de tout notre cœur et de toute notre âme. (Deutéronome X, 12). Ce passage donne en fait tout son sens à l’ensemble de nos engagements religieux.

Notre texte, placé au milieu d’un discours émanant de D.ieu, est précédé d’un rappel de la mission universelle d’ISRAEL, destinée à apporter la lumière et la liberté à l’ensemble de l’humanité. On nous annonce ensuite le retour d’ISRAEL à SION, comme le précise le début de notre Haphtara : « SION disait : le Seigneur m’a abandonnée, il m’a oubliée. » (ISAIE XLIX, 14). En vérité, le prophète veut expliquer que la longueur de l’exil d’ISRAEL n’est pas due à l’oubli par D.ieu de Ses enfants. Ce sont eux, qui par leurs agissements, ont contribué à prolonger cet exil dans lequel ils se trouvent depuis si longtemps, cet exil qui constitue la source de tous leurs malheurs. (MALBIM).

Pour nous donner un aperçu de la consolation que le prophète est chargé d’annoncer, nous pouvons nous référer au texte suivant tiré du chapitre XLIX, verset 16 : « Vois donc, je t’ai gravée sur les paumes de mes mains, tes remparts sont constamment devant moi. » Ces paroles contiennent une forme de consolation inépuisable pour tous ceux qui, à travers le temps, se sont érigés en défenseurs, en remparts de la Torah, pour empêcher qu’elle ne soit oubliée ou méconnue. D.ieu n’a certes pas oublié son alliance avec ISRAEL. Pour celui-ci, sa meilleure protection contre sa disparition tient à la manière par laquelle il respecte la Torah. Ceux qui l’étudient et la mettent ensuite en pratique, sont assurément les meilleurs garants du caractère inaliénable de cette alliance.

Depuis la destruction du Temple dont nous venons récemment de rappeler le souvenir par la journée du 9 AB marquée par un jeûne très strict, nous avons connu de très nombreuses persécutions. Le peuple juif les a subies dans sa chair. « J’ai tendu le dos à ceux qui me frappaient, et mes joues aux violences. » (ISAIE L, 6). A relire ces versets et bien d’autres passages de la même trempe, on ne peut s’empêcher de penser à la sombre période du Moyen-Age, de celle de l’Inquisition ou plus près de nous à celle de la SHOAH. Toutes ces périodes de notre Histoire nous invitent à réfléchir et à méditer sur la difficile condition des Juifs. Animé d’une confiance inébranlable en D.ieu, ISAIE a dû subir les épreuves qui lui étaient imposées, qu’elles fussent d’ordres physiques ou spirituelles. Les ennemis d’ISRAEL voulant s’attaquer à la vérité que proclamait le prophète ont alors utilisé des méthodes bien souvent remises en vigueur : frapper les personnes, ou encore jeter le discrédit en forgeant des mensonges. Cela fait partie de l’enseignement du mépris et de l’art de la désinformation si souvent utilisée de nos jours. C’est ce que semble d’ailleurs suggérer le verset 7 du chapitre 51 disant : « Ecoutez-moi, vous qui connaissez la justice, peuple qui portes ma loi dans ton cœur ! Ne craignez pas les insultes des hommes et ne soyez point effrayés de leurs outrages » Nous avons quotidiennement bien des exemples de ce genre comportement agressif à notre encontre.

Nous terminerons par une dernière citation, elle aussi digne d’intérêt. C’est celle que nous offre le chapitre LI, verset 2 : « Considérez ABRAHAM , votre père, SARA, qui vous a enfantés ; lui seul je l’ai appelé, je l’ai béni et multiplié. » Ce rappel des origines lointaines d’ISRAEL nous enseigne que nous ne devons pas désespérer des promesses divines. Le père de tous les croyants était seul, mais sa descendance spirituelle s’est considérablement multipliée. Nous en sommes tous les témoins vivants, bien des millénaires après lui .

De la même manière, ISRAEL, seul au milieu des nations, finira par amener d’autres hommes à partager sa croyance dans le D.ieu Unique. D’autre part, de même qu’ABRAHAM et SARA ont eu le bonheur d’avoir un fils, et ce, malgré leur âge avancé, conformément aux promesses divines, ainsi, ISRAEL verra un jour la fin de son long exil, quelles que soient les difficultés qu’il puisse rencontrer sur son chemin (RADAK), même quand celles-ci semblent en apparence aller à l’encontre de toutes les visions prophétiques d’espérances.

 

Grand Rabbin Alain GOLDMANN
Grand Rabbin du Consistoire de Paris Ile de France

 

Publié dans PARACHA DE LA SEMAINE

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