LA PARACHA DE CETTE SEMAINE EST COMMENTE PAR LE RABBIN YONI KRIEF

Publié le par Initiative Rabbinique

                                                       Lekh lekha

                   Séparation mais non désintéressement
 
Pour se rendre en pays de Canaan, Abraham abandonne toute sa famille sauf Loth qu’il emmène avec lui ; ceci prouve bien qu’il place un espoir en son neveu. Mais un épisode se produit et change la donne.
En effet, une dispute éclate entre les bergers des troupeaux d’Abraham et ceux de Loth, son neveu.  
Devant cet événement et avant que la situation ne s’aggrave, Abraham propose à Loth de se séparer.
En effet, Abraham s’exclame, s’adressant à son neveu Loth : « Tout le pays n’est-il pas devant toi ? De grâce, sépare-toi de moi : si tu vas à gauche, j’irai à droite ; si c’est à droite je prendrai à gauche.  
Genèse (13.9)
 
Cette décision d’Abraham est surprenante ?  
La Torah ne nous dit-elle pas ailleurs, comment Abraham accueille avec un soin particulier des nomades idolâtres de sorte qu’il les restaure, propageant ainsi son enseignement avec beaucoup de chaleur sans se soucier de leur niveau de moralité, les qualités fondamentales d’Abraham étant la tolérance, l’hospitalité et le souci d’autrui. Dès lors, comment comprendre la conduite d’Abraham prêt à tous les sacrifices pour rapprocher des personnes inconnues, très loin de la vérité, alors que devant cet épisode, Abraham se focalise et n’hésite pas à rompre le lien avec un membre de sa famille ?
Pour comprendre la nature des sentiments d’Abraham vis-à-vis de son neveu Loth, il convient tout d’abord de rapporter en substance les propos du Séfer Ha-ikarim au quatrième partie, chapitre 26. L’auteur nous apprend que deux conduites peuvent entraver le repentir. La première c’est l’ignorance : le fauteur ignore qu’il a fait une erreur ; en conséquence, il reste insensible au remords et à l’amendement. La seconde, c’est l’entêtement à se justifier ; il prétend qu’il agit correctement.
Ainsi, Loth se cantonne dans un aveuglement volontaire en s’éloignant du droit chemin, attiré farouchement par les mauvaises mœurs des habitants de Sodome et par cette course effrénée vers les biens matériels. C’est pourquoi, Loth choisira de s’installer vers l’Orient, région extrêmement riche et fertile.
Les bergers d’Abraham réprimandent ceux de Loth qui laissent paître leurs bêtes dans les champs d’autrui. Autrement dit, ils leur reprochent une certaine malhonnêteté.   
Pour répondre à cette accusation, ceux de Loth leur disent : « Ce pays n’appartient-il pas à Abraham ?  Abraham, disent-ils, n’a pas eu d’héritier et, selon toute logique, c’est Loth, son plus proche parent, qui sera son seul héritier ».
Cette tendance à se justifier semble dangereuse aux yeux d’Abraham. Loth reste imperméable à toute réprimande. Il n’est plus prêt à écouter des paroles de vérité et, en dépit de tout cela, il se laisse volontairement guider par ses envies.
Conscient de ce défaut, Abraham se résout à se séparer de Loth et estime que cela est préférable pour se préserver et protéger son entourage de la mauvaise influence de son neveu.
En ce qui concerne cette rupture, Abraham n’a aucunement l’intention de se désintéresser de Loth : « Si tu vas à gauche, j’irai à droite » dit-il. Rachi explique : je ne m’éloignerai pas de toi et je serai toujours prêt à venir te secourir. Cette décision n’affectera nullement ses sentiments fraternels. Effectivement, dès qu’Abraham entendra que son neveu est retenu prisonnier, il n’hésitera pas un instant à venir le délivrer au péril même de sa vie.
Abraham ne renonce nullement à abandonner son neveu. Confiant, il se dit que ce n’est qu’en faisant soi-même l’expérience des épreuves que Loth grandira et évoluera dans le bon sens. En espérant que par ce biais, il réussira à apprécier son retour vers les siens et vers D.
Notre paracha évoque un problème d’actualité : Où commence et où s’arrête notre responsabilité par rapport à l’évolution spirituelle des autres. Et dans quelle mesure doit-on les aider ?
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